Dévoilée juste avant Noël, la main tendue par l’Alliance Évangélique Suisse allemande (AES) dans l’affaire de l’initiative anti-minarets a fait les gros titres des médias. «Les évangéliques tentent un miracle de Noël», titrait le Matin Dimanche pour évoquer l’initiative de l’organisation faîtière des évangéliques outre-Sarine. Concrètement, l’AES invite d’un côté les musulmans à renoncer à la construction de minarets et de l’autre l’UDC et l’UDF à cesser leur récolte de signatures. Et pour en parler, les deux parties sont invitées à une table ronde.
Pour Fritz Herrli, porte-parole de l’AES, cette démarche conjointe avec la VFG vise à sortir d’une impasse gênante: «La récolte de signatures pour l’initiative anti-minaret a eu pour seul effet de crisper les parties et de figer les fronts». Au siège zurichois de l’Alliance, on considère que l’aboutissement de l’initiative aurait, quelle que soit l’issue du vote, des effets désastreux sur la paix religieuse en Suisse.
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Il est encore trop tôt pour savoir comment les deux parties réagiront à cette invitation. En effet, la période des fêtes était peu propice aux consultations internes. Cependant, le président des musulmans argoviens est le premier à avoir répondu à l’AES: «Votre démarche revêt une grande signification. Elle est bien meilleure que des déclarations peu documentées sur les musulmans», a écrit Halit Duran, en promettant de soumettre la proposition à son comité et de donner une réponse officielle.
Dans le Matin Dimanche, Hafid Ouardiri, ex-porte-parole de la Mosquée de Genève, s’est montré plus méfiant. Il pense que de nouveaux intermédiaires sont inutiles dans le dialogue interreligieux, qu’il qualifie de «bien installé en Suisse». Pour lui, «cette démarche n’est qu’une façon pour les évangéliques de se donner bonne conscience par rapport à une initiative qu’elle voulait d’abord soutenir.»
Le son de cloche est plus enthousiaste du côté des initiants. Christian Waber, coprésident du comité d’initiative et Conseiller national UDF, voit d’un bon œil la proposition de l’AES. Même si à défaut d’avoir pu se réunir avec le comité d’initiative, il ne peut s’exprimer qu’à titre personnel, il pense que l’initiative deviendrait inutile si les musulmans renonçaient à construire des minarets. Pour Christian Waber, il est néanmoins indispensable que les musulmans qui viendraient à la table ronde de l’AES soient suffisamment représentatifs de l’islam en Suisse.
Les plus sceptiques ne croient pas possible qu’un mot d’ordre ou une promesse soient respectés par toutes les communautés musulmanes. Christian Waber répond qu’un accord avec des organisations faîtières servirait de base légale pour contester d’éventuels futurs projets de constructions.
Toujours selon le parlementaire UDF, l’enjeu de ce dossier est clairement la paix religieuse en Suisse. Et à ce titre, la proposition de l’AES est bienvenue.

Christian Willi

Christianisme Aujourd'hui

Article tiré du numéro Christianisme Aujourd’hui – Février 2008

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