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Pornographie: pour mieux protéger les mineurs

© GettyImages
Pour se rendre sur ces sites, seuls deux clics sont nécessaires. Mais plus pour longtemps.
Celia Evenson

«Enfin, on a les pouvoirs publics avec nous!» s’enthousiasme Franck Meyer, président du Comité protestant évangélique pour la dignité humaine (CPDH). En effet, comme au Parlement britannique actuellement ou dans plusieurs Etats américains, le gouvernement français vise le blocage effectif de l’accès des personnes mineures à la pornographie. Une urgence, alors que de plus en plus d’enfants visitent des sites proposant des contenus pornographiques. En effet, d’après une récente étude de Médiamétrie, au moins la moitié des Français de douze ans seraient concernés.

Des solutions discutées

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L’obligation légale du contrôle de l’âge existe depuis 2020, mais jusqu’à présent les hébergeurs de ces sites se contentaient d’une case à cocher par l’utilisateur (qui déclare simplement qu’il a plus de dix-huit ans). Or, l’enjeu du projet de loi sur le numérique présenté à l’Assemblée nationale à partir du 4 octobre est d’imposer des moyens efficaces pour la vérification de l’âge des internautes qui visitent ces sites.

Une solution a été testée cet été par le groupe Dorcel, vétéran français du cinéma pornographique: le double anonymat. Les internautes font vérifier leur âge par un prestataire neutre, qui confirme qu’ils sont majeurs aux sites concernés.
Pour le secteur florissant de l’industrie pornographique, c’est un coup dur. En effet, Pornhub, le mastodonte canadien qui cumule plusieurs dizaines de milliards de visites par an, est le 13e site le plus fréquenté au monde, juste derrière Amazon. De telles plateformes contrattaquent en dénonçant l’inefficacité technique du contrôle de l’âge, ainsi que le droit à la vie privée des adultes.

Une dissuasion élargie

«Le système me paraît très lourd, mais efficace. Je ne vois pas trop comment le contourner, s’il y a une tierce partie qui vérifie. Toutefois, les mineurs sont ingénieux et ils trouveront probablement des failles», juge Ambroise Popper, vice-président d’une société informatique et père de famille. Il reconnaît qu’«un enfant motivé et malin trouvera toujours un moyen de contourner le système ou de s’appuyer sur des copains qui pourraient y avoir accès», alors que lui-même utilise un contrôle parental «costaud». Toutefois, Franck Meyer voit en ces solutions un vrai frein aux premières visites qui pourrait décourager les opportunistes.

Aux Etats-Unis, des lois similaires se sont révélées dissuasives pour les adultes, peu désireux d’avoir leur identité stockée en lieu soi-disant sûr. En Louisiane, rapporte Politico, le trafic de Pornhub a diminué de 80% après l’adoption de la loi en 2022. De plus, le coût de la vérification, 65 cents (60 centimes) met à mal son modèle économique. Ainsi, Pornhub s’est retiré de plusieurs Etats en espérant que la liberté d’expression lui rendra le droit de ne rien contrôler.

Une victoire dans la lutte spirituelle

Signe que les acteurs de la pornographie ont peur, le CPDH, cosignataire d’une lettre au président français en 2020, a fait l’objet de menaces de leur part. Pour Franck Meyer, cette loi est une étape du «combat du bien contre le mal»: les internautes, mal à l’aise lors de leur contact prématuré avec ce monde et maintenant malheureux, «sont et font des victimes», tandis que les actrices sont souvent issues de la traite d’êtres humains.

Quant à la Suisse, dans la même situation que la France, une motion du Parti évangélique (PEV) pour protéger les moins de seize ans a été adoptée le 21 septembre. Plutôt qu’une vérification des identités, les législateurs envisagent de mieux promouvoir le contrôle parental.

Christianisme Aujourd'hui

Article tiré du numéro Christianisme Aujourd’hui Novembre 2023

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