«Nous avons tous un impact sur le monde»
Qu’est-ce qui vous a poussé à créer l’association Wungana Mozambique?
Lors de mon premier voyage en Afrique du Sud, à l’âge de dix-huit ans, je me suis rendu compte de la violence et de la pauvreté dans lesquelles vivent certaines personnes. Cela a éveillé en moi un grand désir d’agir. Au sein de l’école de disciples que j’ai suivie, je me suis lié d’amitié avec des personnes qui m’ont inspiré par leurs ambitions et leur sens du sacrifice. J’y ai rencontré mon meilleur ami, mais aussi Emerson et Caitlyn, un couple passionné par la mission et le service qui était alors en train de fonder une petite association au Mozambique.
A mon retour en Suisse, je ne rêvais que de retourner en Afrique. J’ai profité de trois semaines de vacances pour aller visiter Emerson et Caitlyn au Mozambique et ce voyage a fait naître en moi un amour profond pour ce magnifique pays. Plus tard, j’y ai organisé un voyage avec quatre amis et j’ai eu la joie de les voir être touchés comme je l’avais été par la simplicité de la vie, les besoins immenses mais aussi par la joie de vivre et l’accueil des habitants de ce pays. A notre retour, nous avons créé l’Association suisse de soutien à Janela Africana, l’association créée par Emerson et Caitlyn.
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Quelles sont les valeurs qui vous motivent?
La solidarité, la compassion et l’amitié. Le plaisir de voir que, grâce à nos actions, du changement concret se produit dans la vie de celles et ceux qui font face à des situations difficiles est un grand catalyseur d’énergie. Par exemple, au sein de nos projets, nous avons pu financer une camionnette (photo) ainsi qu’une formation de mécanique grâce à une course de solidarité, un poulailler avec une production de 600 poulets par mois et quelques centaines d’œufs grâce au don d’une Eglise, la plantation de 400 arbres fruitiers et actuellement, la mise en place d’une boulangerie solaire grâce au don d’une association. Là où certains reçoivent un salaire comme fruit de leur engagement, nous recevons, en tant que bénévoles, de la joie. Et c’est à mes yeux bien plus précieux.
Comment l’association a-t-elle évolué depuis?
En 2022, nous avons changé de nom pour devenir Wungana Mozambique, un nom trouvé en collaboration avec nos amis mozambicains et qui signifie «amitié». Au travers de ce changement, nous souhaitions aussi marquer une prise de distance avec le projet Janela Africana car nous commencions à sentir une dépendance négative à notre égard. En tant qu’association, notre désir est de développer une grande proximité avec nos amis sur place, tout en les laissant pleinement autonomes dans la direction à donner à leurs projets. C’est un équilibre difficile que nous apprenons à apprivoiser avec le temps.
Nous avons changé notre manière de travailler pour soutenir presque exclusivement des projets locaux générateurs de revenus, de façon à leur permettre d’être autonomes financièrement. Aujourd’hui, nous soutenons trois projets dans les domaines de la scolarisation et de l’implantation d’Eglises, de l’accueil pour les jeunes filles et des personnes âgées, ainsi qu’un projet agricole dont l’objectif est d’offrir des emplois aux villageois vivant dans une extrême pauvreté.
Quel rôle joue votre foi dans votre engagement?
Ma foi me permet de trouver la force de persévérer lorsque je suis épuisé ou découragé. Elle me rappelle que je fais les choses avant tout pour rendre gloire à Dieu. Elle me donne aussi une espérance, car il est difficile de voir l’impact modeste que nous pouvons avoir dans un monde si grand et si complexe. C’est une bonne chose de se souvenir que Dieu est le maître souverain et que, quoi qu’il advienne, la plus grande des richesses est la vie éternelle.
Pour vous, s’engager pour la justice et la durabilité, qu’est-ce que cela veut dire?
Je crois que nous avons tous une influence sur le monde. S’engager pour la justice et la durabilité signifie pour moi limiter son impact négatif et amplifier son impact positif. Je cherche à le pratiquer dans ma vie de tous les jours en essayant de vivre dans la sobriété et en reconnaissant que l’énergie que nous consommons est un don de Dieu que je ne souhaite pas gaspiller. J’essaie aussi de ne posséder que ce dont j’ai besoin. Et si je n’ai plus l’utilité d’un objet, je le vends et récolte quelques francs pour l’association.
Quels sont les défis auxquels la jeune génération fait face?
Je crois que nous sommes habitués à utiliser l’énergie à outrance, à tel point qu’un petit geste peut sembler grand alors que dans le fond, nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir. Nous oublions facilement d’où l’on vient et ce que nos anciens ont vécu pour façonner le monde dans lequel nous vivons, la difficulté de la vie et le travail de ceux sur lesquels on s’appuie encore aujourd’hui à l’autre bout du monde.
En même temps, je vois une grande soif de justice chez les jeunes et c’est réjouissant. Espérons que nous conserverons ces aspirations et trouverons la force de vivre en cohérence avec elles dans notre vie quotidienne, ce qui n’est pas évident lorsque nous vivons dans un monde conçu pour aller dans un sens différent.
Propos recueillis par Joëlle Misson-Tille, collaboratrice de la campagne StopPauvreté
Qui est Sébastien Gilliand?
Sébastien Gilliand est ingénieur en hydraulique et termine ses études de master à côté de son travail à temps partiel. Adolescent, il était passionné d’astronomie et, même si les occasions sont rares, il aime ressortir son télescope et s’émerveiller devant la grandeur de l’univers. Il apprécie aussi la randonnée et le camping en montagne. En tant que président de l’association Wungana Mozambique, qu’il a créée, il coordonne le comité, communique avec les partenaires sur le terrain, organise des voyages et se charge des dossiers pour les récoltes de fonds.