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Une nation sous le regard de Jésus

© Cornelis Springer (1817-1891) – Vue de La Haye (Pays-Bas) avec l'hôtel de ville en 1859 / «Nous avons l'exemple des chrétientés réformées néerlandaises, ou anglaises à partir du 18e siècle qui montrent que la tolérance religieuse est compatible avec une chrétienté»
Tribune. Le magistrat est un serviteur de Dieu, même dans les nations modernes, rappelle Etienne Omnès, contributeur du site Par la foi. Il plaide pour une nouvelle chrétienté, fidèle aux commandements divins, innovante et loin de toute nostalgie.
Etienne Omnès

Cette tribune a été publiée en réponse à celle de Philippe Henchoz «Le nationalisme chrétien est un péché.» publiée la semaine dernière sur notre site.

Dieu a créé l’homme pour la paix et non la guerre, pour la coopération et non la concurrence. C’est ce qui découle du mandat créationnel, lorsque Dieu nous a donné pour mission la gestion responsable de la Création (Gen 1,28-29). Or, il nous a créés individuellement faibles, et incapables de pourvoir à tous nos besoins par nous-mêmes. Cela n’est pas une erreur de la part de Dieu, mais une préparation à l’amour pour Dieu (qui nous donne ce dont nous avons besoin) et à l’amour du prochain (qui nous assiste et que nous assistons).

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Dieu nous a donc créés en vue de l’association, avec l’amour comme seule façon de survivre, puis vivre, puis prospérer. C’est pourquoi l’histoire humaine commence par la famille et non l’individu, car c’est pour la communauté que Dieu nous a voulus. Or, plus la communauté est grande, plus elle est puissante et capable de satisfaire nos besoins. Mais en grandissant, cela génère une complexité telle qu’il devient plus efficace qu’une personne y soit consacrée à plein temps. Une personne déléguée par la communauté pour la diriger et gérer ses difficultés et ses dangers. Un chef capable d’orienter chaque individu vers le bien commun, et d’organiser efficacement la communauté vers sa propre préservation et prospérité. 

En termes classiques: il faut qu’il y ait un magistrat.

Le magistrat est serviteur de Dieu

Ce que la loi naturelle annonce, la Bible le confirme: juste après le Déluge, en même temps que Dieu formalise le pouvoir de l’homme sur la Création (Gen 9,3-4) il institue aussi la fonction du magistrat (Gen 9,5-6) pour préserver l’homme et sa communauté. Cette interprétation est confirmée en Romains 13, où l’apôtre Paul rappelle que «toute autorité vient de Dieu, et celles qui existent ont été établies par Dieu» et que «le magistrat est serviteur de Dieu pour ton bien mais aussi qu’il est serviteur de Dieu pour manifester sa colère en punissant celui qui fait le mal».

Ce que la Bible confirme, les chrétiens anciens l’ont fidèlement soutenu. C’est ainsi que la confession de la Rochelle dit, en son article 39, bien avant les évangéliques américains:

  • «Nous croyons que Dieu veut que le monde soit dirigé par des lois et des gouvernements, afin qu’il y ait quelques freins pour réprimer les appétits désordonnés du monde. Nous croyons donc que Dieu a institué les Royaumes, les Républiques et toutes autres sortes de Principautés, héréditaires ou non, et tout ce qui appartient à l’état de la justice, et qu’il veut en être reconnu l’auteur.»
  • «Dans ce but, Dieu a mis le glaive dans la main des magistrats pour réprimer les péchés commis non seulement contre la seconde Table des commandements de Dieu, mais aussi contre la première.»

En bref: la nature, la Bible et la Tradition sont unanimes pour dire que les officiers politiques sont des serviteurs de Dieu.


La modernité a-t-elle mis fin à cette dépendance?

Certes, mais cette doctrine biblique est-elle applicable à nos nations actuelles? La modernité (y compris politique) n’a-t-elle pas mis fin à cette dépendance? Ce qui est élu par le peuple peut-il être soumis à Dieu?

La réponse est plus claire que beaucoup ne le voudraient: 

  • «[Les autorités] qui existent ont été établies par Dieu.» (Rom. 13,4). Y compris l’empereur païen Néron au pouvoir à ce moment-là.
  • Jésus répondit [à Ponce Pilate]: «Tu n’aurais aucun pouvoir sur moi s’il ne t’avait pas été donné d’en haut» (Jn 19,11). Dieu n’établit pas seulement les chefs d’Etat, mais aussi les fonctionnaires individuels.

Les doctrines humaines, même modernes, ne peuvent pas être opposées à la parole de Dieu. Donc nos républiques et leurs fonctionnaires, nos juges et leurs policiers sont des serviteurs de Dieu, et rien n’est plus normal que d’attendre qu’ils lui soient soumis. Ce n’est pas un choix, mais un statut naturel.

Défendre la première Table

Tout chrétien sera facilement en accord avec cela. Le point délicat aujourd’hui, c’est cette phrase de nos pères:
«Dieu a mis le glaive dans la main des magistrats pour réprimer les péchés commis non seulement contre la seconde Table des commandements de Dieu, mais aussi contre la première.»

Autrement dit: le magistrat doit décourager les cultes idolâtres, l’usage religieux des images, et le blasphème, et encourager le culte public. Considérant l’histoire de l’Eglise et de l’Europe, nous lisons régulièrement que c’était une option condamnée dès le commencement, voire un péché. Nous entendons qu’un chrétien ne devrait pas même désirer ces choses.

Mais comme nous l’avons vu en début d’article, ce n’est pas la nostalgie, l’ignorance, ou le péché qui nous amènent à défendre que le magistrat est un officier de Dieu pour gérer la Création. C’est la nature, la Bible et la tradition.


Une grande liberté dans l’application

On objectera que c’est un régime autoritaire nécessairement intolérant. En réalité, derrière un principe simple, il y a une grande liberté dans l’application. Et même dans le passé, nous avons l’exemple des chrétientés réformées néerlandaises, ou anglaises à partir du 18e siècle qui montrent que la tolérance religieuse est compatible avec une chrétienté. L’ordre politique américain du 19e siècle montre également qu’une chrétienté sans Eglise officielle est possible.

L’objectif pour nous ne sera pas de refaire une chrétienté ancienne, sans quoi nous referons les mêmes erreurs qu’auparavant. Notre objectif est plutôt de faire de nouvelles propositions, qui respectent à la fois notre prochain et notre Dieu. Nous ne proposons pas la nostalgie, mais l’innovation et la fidélité.



Un abus du principe et non de nature

On objectera que c’est se joindre aux forces ténébreuses qui agitent bien des nations, que ce serait faire alliance avec des forces politiques contraire à notre foi. Admettons dans cet article que ce soit le cas, et qu’aux Etats-Unis et au Brésil les chrétiens aient effectivement fauté dans leurs alliances. Je défends que cela constitue au pire un abus du principe de chrétienté, et non sa nature, et qu’une meilleure application est possible.
Il n’y a pas de chrétienté unique à toutes les nations. En réalité, chaque nation est appelée à élaborer sa réponse propre à l’appel de Dieu, en fonction de son génie, de son histoire et de ses opportunités. Nous ne devons pas suivre l’exemple américain ou brésilien: nous devons proposer notre propre modèle, qui tiendra compte de l’histoire, des particularités de notre nation, et éviter les erreurs des autres.

On objectera que les nations et les systèmes politiques ne peuvent pas être chrétiens. Nous répondons que les nations peuvent être chrétiennes de la même façon que les familles peuvent être chrétiennes: non parce que le moindre membre est chrétien né de nouveau, mais parce que la culture de cette famille cherche à honorer Dieu. 



L’évangélisation plus difficile dans une société déchristianisée

On objectera qu’un christianisme culturel est sans valeur. Je réponds en disant que jamais l’évangélisation n’a été aussi difficile que depuis sa disparition. L’espace me manque ici pour développer comment nationalisme et christianisme peuvent avoir une juste expression, aussi, je vous renvoie vers Bradford Littlejohn: «Le nationalisme comme alternative à l’individualisme et l’impérialisme». 

Aimons Dieu, aimons notre prochain, non seulement dans notre cœur, mais aussi dans notre vie personnelle. Non seulement dans notre vie personnelle, mais aussi dans notre vie publique. Il n’y a là aucun péché, mais au contraire, c’est là la volonté de Dieu.

Etienne Omnès 

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