Trump, Sartre et l’Amour Ouf
A l’aube du 6 novembre dernier, au moment de l’élection à la présidentielle de Donald Trump, une grande partie de nos contemporains étasuniens se sont réveillés dans un rêve devenu réalité. Leurs compatriotes démocrates, eux, sont restés plongés dans une nuit de cauchemars. Une même réalité aux goûts d’enfer et de paradis. Les campagnes électorales de ces derniers mois l’ont démontré: les Etats-Unis sont profondément divisés. Et le reste du monde regarde, pop-corn à la main, la plus grande puissance mondiale se déchirer en deux, comme une pièce de théâtre aux rebondissements enivrants et frisant le ridicule, heureux de savoir que chez soi, l’unité règne. C’est faux. Pas de pop-corn et pas de légèreté. Nous observons, nous retenons notre souffle, nous vivons au rythme des événements qui bouleversent notre monde et nous savons bien que nous ne sommes pas à l’abri – si pas déjà victimes – de telles déchirures dans nos milieux évangéliques.
Dans «Huis clos» (photo), l’excellente pièce de théâtre écrite et présentée en pleine période de guerre mondiale, Jean-Paul Sartre le disait bien: «Alors c’est ça l’enfer. Je ne l’aurais jamais cru… Vous vous rappelez: le souffre, le bûcher, le gril. Ah quelle plaisanterie. Pas besoin de gril, l’enfer c’est les autres.» L’autre: mon prochain. Celui qui pense différemment, celui qui vote différemment, celui avec lequel je n’ai rien, mais alors rien en commun, mais aux côtés de qui je suis forcé de vivre. Parce que le philosophe militant, pourtant pas chrétien pour un sou, touchait du doigt une part de vrai: le véritable mal, c’est ce qui nous divise – communément appelé le Diviseur chez les chrétiens. On l’a vu, ces dernières années, à l’action. Il nous fait penser qu’il est candidat ou idéologie politique, qu’il est vaccin ou résistance au vaccin, qu’il est conflit israélo-palestinien ou que sais-je, mais en réalité, il est division.
Et pour nous chrétiens, appelés par le Christ lui-même à vivre en unité, la tâche est ardue. Elle nous demande de nous placer en tension entre ce qui est et ce qui est à venir, résolument déterminés à ne pas faire de l’autre mon enfer personnel. Mais plus encore, à laisser l’autre me changer, m’interpeller, me déplacer.
A l’image de Jackie et Clotaire (c’est bientôt Noël, finissons sur une bonne note): tout sépare ces deux adolescents vedettes de «L’Amour Ouf», drame romantique de Gilles Lellouche en ce moment dans les salles de cinéma, mais ils tombent follement amoureux l’un de l’autre. Un amour si ouf qu’il change la trajectoire de leur vie et les sauve, dans tous les sens du terme.
En 2025, osons le pari d’un amour ouf, celui que nous connaissons en Jésus incarné né dans une étable et qui, nous transformant à son image, nous change profondément nous, notre prochain et pourquoi pas, la trajectoire de ce monde?
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Article tiré du numéro Christianisme Aujourd’hui Décembre 2024
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