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«Inch’Allah», Adamo

Adamo-Inch' Allah-image
© DR
Ces hits entrés dans l'histoire
Jonathan Hanley

Ce titre célèbre des années 60 exprime avec une poésie douce-amère le paradoxe du Moyen-Orient: une beauté extraordinaire entachée par les conflits et le sang versé. Le poète comptait composer un chant simple pour en parler, «un quatrain». Or il constate que le malheur de Jérusalem nécessiterait plutôt un «requiem», une œuvre élaborée de lamentation et de regrets.

Le sentiment pro israélien de cette chanson inspirée par les troubles qui conduisirent à la guerre des Six Jours en 1967 lui valut la censure du monde arabe. Une nouvelle version composée par Adamo en 1993, se voulant plus neutre du point de vue politique, fut critiquée de manière acerbe par la communauté juive pour son abandon de la référence à la Shoah. Un enregistrement en 2001 avec des paroles plus inclusives exprime le vœu de voir «fils d’Ismaël et fils d’Israël» libérer ensemble «une colombe dans le ciel». Le chanteur rejoignait ainsi les partisans d’un optimisme humaniste gentil mais irréaliste.

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Adamo interpelle aussi les chrétiens

Dans le texte, Adamo interpelle aussi les chrétiens: «Humble chapelle, toi qui murmures “paix sur la terre”», en leur reprochant leurs paroles doucereuses qui semblent occulter «ces lettres de feu: “Danger. Frontière”». Dans la version d’origine, il s’adresse à Dieu – celui des juifs, des musulmans et des chrétiens – en lui reprochant de ne pas voir les «enfants qui tremblent». Le refrain est effectivement une interjection lancée vers le Très-Haut – «Inch’Allah», «Si Dieu le veut!» – par laquelle Adamo semble lui tenir rigueur pour la souffrance de ces populations déchirées. On peut reprocher au chanteur d’accuser Dieu pour les malheurs que s’infligent réciproquement les êtres humains. Son argument est fréquent, superficiel et ignorant des réalités bibliques de l’Evangile. Il est facile de dédouaner l’être humain de sa cruauté en reprochant à Dieu de ne pas intervenir.

Mais en tant que croyants, nous faisons bien d’écouter le message au cœur de cette chanson, car de nombreux chrétiens contemporains à l’esprit «guerrier» ne voient que les considérations prophétiques voire eschatologiques dans les enjeux politiques du Moyen-Orient. Or finalement, ce sont effectivement des millions d’âmes «tombées des deux côtés du drame» dont le sang continue d’arroser «le sable infâme».

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Artiste: Salvatore Adamo

Titre: Inch’Allah

(version originale, 1966)

J’ai vu l’Orient dans son écrin
Avec la lune pour bannière
Et je comptais en un quatrain
Chanter au monde sa lumière

Mais quand j’ai vu Jérusalem
Coquelicot sur un rocher
J’ai entendu un requiem
Quand sur lui je me suis penché

Ne vois-tu pas humble chapelle
Toi qui murmures « Paix sur la terre »
Que les oiseaux cachent de leurs ailes
Ces lettres de feu: « Danger frontière »

Le chemin mène à la fontaine
Tu voudrais bien remplir ton seau
Arrêtes-toi Marie-Madeleine
Pour eux ton corps ne vaut pas l’eau

Inch’Allah, inch’Allah

Et l’olivier pleure son ombre
Sa tendre épouse, son amie
Qui repose sur les décombres
Prisonnière en terre ennemie

Sur une épine de barbelé
Le papillon guète la rose
Les gens sont si écervelés
Qu’ils me répudieront si j’ose

Dieu de l’enfer ou Dieu du ciel
Toi qui te trouve où bon te semble
Sur cette terre d’Israël
Il y a des enfants qui tremblent

Inch’Allah, inch’Allah

Les femmes tombent sous l’orage
Demain le sang sera versé
La route est faite de courage
Une femme pour un pavé

Mais oui j’ai vu Jérusalem
Coquelicot sur un rocher
J’entends toujours ce requiem
Lorsque sur lui je suis penché

Requiem pour six millions d’âmes
Qui n’ont pas leur mausolée de marbre
Et qui malgré le sable infâme
Ont fait pousser six millions d’arbres

(nouvelle version, 1993)
J’ai vu l’Orient dans son écrin
Avec la lune pour bannière
Et je comptais en un quatrain
Chanter au monde sa lumière

Mais quand j’ai vu Jérusalem
Coquelicot sur un rocher
J’ai entendu un requiem
Quand sur lui je me suis penché

Ne vois-tu pas, humble chapelle
Toi qui murmures « Paix sur la terre »
Que les oiseaux cachent de leurs ailes
Ces lettres de feu: « Danger frontière »

Mais voici qu’après tant de haine
Fils d’Ismaël et fils d’Israël
Libèrent d’une main sereine
Une colombe dans le ciel

Inch’Allah, Inch’Allah

Et l’olivier retrouve son ombre
Sa tendre épouse, son amie
Qui reposait sur les décombres
Prisonnière en terre ennemie

Et par-dessus les barbelés
Le papillon vole vers la rose
Hier on l’aurait répudié
Mais aujourd’hui, enfin il ose

Requiem pour les millions d’âmes
De ces enfants, ces femmes, ces hommes
Tombés des deux côtés du drame
Assez de sang, Salam, Shalom

Inch’Allah, Inch’Allah

Christianisme Aujourd'hui

Article tiré du numéro Christianisme Aujourd’hui Mars 2021

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