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Le blues des bancs vides

La chronique mensuelle d'Hugues Not, qui jette un regard doux-amer sur le protestantisme et la société

Ça se passe au fond du temple. Il est ouvert, mais vide. Ouvert parce qu’en période estivale, dans cette région touristique, le conseil presbytéral en a décidé ainsi. Mais seulement pour le temps des vacances et avec une permanence, pour éviter les vols et parler aux éventuels visiteurs. Il n’y a rien à voler et quasiment rien à visiter, mais voilà: sur le dernier banc est assis un vieux pasteur retraité. C’est lui, la permanence. Au moins, il est au frais! Il attend le chaland et c’est surtout le temps qui passe. Lentement. Alors il pense, repense, somnole et se souvient. De son temps, le temple n’était pas vide le dimanche. Mais que s’est-il passé?
–CREDIT–
Et voilà qu’un jeune homme s’assoit près de lui. Ils se connaissent et se sourient. C’est un étudiant de la faculté de théologie, un stagiaire qui se demande s’il sera pasteur ou gardien d’un musée. Lui aussi s’interroge sur ce qui s’est passé, les souvenirs en moins.
Le vieux pasteur a l’odeur de la nostalgie tandis que le temple a celle du renfermé. Alors, il parle d’hier et d’avant-hier. Il a une petite idée du mal qui frappe son Eglise et il la partage. Trop de critiques en interne. Dans le temps, les attaques venaient de l’extérieur. Ceux qui ne croient pas contre ceux qui croient; les athées contre les croyants; les libres-penseurs contre les chrétiens. Au moins, c’était clair et on connaissait l’adversaire. Aujourd’hui, les ironies, les opinions critiques ne sont pas de réelles oppositions et moins encore des persécutions. La tolérance et surtout l’indifférence sont de mises et il n’y a plus que le pape pour se faire incendier par les médias.
Par contre, en interne, on semble aimer se juger, se condamner, s’excommunier. Les camps et les clans s’opposent. Certes, ce ne sont pas des armées nombreuses, juste quelques guerres de tranchées entre irréductibles qui se prennent pour l’Armée de l’Éternel.
A l’époque de Luther, de Zwingli et de Calvin, on se disputait sur le sens de la Cène; aujourd’hui, on se déchire sur le nombre et la qualité des dons, sur les manifestations de l’Esprit, le nombre de baptêmes, la prospérité, l’éthique et l’engagement dans le monde. Il y a presque plus de sujets de discorde que de paroissiens! Un jour, il faudra rendre des comptes pour tous ces mauvais combats qui divisent et dispersent.

Christianisme Aujourd'hui

Article tiré du numéro Christianisme Aujourd’hui – octobre 2009

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