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Un aumônier au cœur des ténèbres

Pendant l’année qu’a duré le procès de Nuremberg, Henri Gerecke a noué un contact étroit avec les criminels de guerre nazis
Joël Reymond

Le 1er octobre 1946, il y a soixante ans, s’est terminé le procès le plus célèbre de l’Histoire: celui où furent jugés les principaux chefs du IIIe Reich.
Une année plus tôt, Henri Gerecke était convoqué de Munich. Cet aumônier protestant américain de cinquante-trois ans est alors nouveau dans l’armée. Il apprend que les puissances alliées ont décidé d’offrir un service d’aumônerie aux hauts responsables du régime nazi. Henri Gerecke parle couramment l’allemand. C’est pour cela qu’on l’a choisi. Mais quel mandat! Deux de ses fils ont été mobilisés et grièvement blessés; il a donc aussi vécu les affres de la guerre dans sa chair. «Comment un humble prédicateur rural du Missouri pourrait-il faire la moindre impression sur les cadres d’Adolf Hitler? Ces hommes ont sacrifié des millions de vies!», se demande-t-il.
Le quartier général des aumôneries militaires lui laisse le choix. Henri Gerecke passe la nuit en prière. Et il reçoit, écrira-t-il, «la grâce d’aimer ces hommes, ces âmes perdues, au-delà de leur péché.»
–CREDIT–
Rien que des hommes
Henri Gerecke est affecté aux protestants, majoritaires, et le père
O’Connor aux catholiques. Durant une année, les deux aumôniers vont devenir les intimes des Goering, Hess et autres Von Ribbentropp. Deux cellules de la prison font office de chapelles.
La plupart des vingt-et-un prisonniers ne sont pas endurcis au point de refuser tout secours spirituel; la machine écroulée, seuls avec leur âme, leurs remords et la proximité de la mort, la donne est tout autre. Le jour du premier office protestant, treize des quinze sièges sont occupés. Fritz Sauckel, ex-ministre de l’affectation de la main-d’œuvre, demande à l’aumônier de le raccompagner jusqu’à sa cellule où il s’effondre en prière: «Ô Dieu, aie pitié de moi pécheur». Après une brève discussion, Sauckel prend la Sainte Cène.
Hans Fritszche, Baldur von Schirach et Albert Speer prennent aussi bientôt la Cène en pécheurs repentants. Érich Raeder, ex-chef de la marine, lit avidement la Bible et communiera lui aussi.

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