Pandémie mondiale de corruption
Depuis cinq mois, des manifestations anticorruption secouent la Serbie. Le mouvement, initié par des étudiants, fait suite à l’effondrement du toit de la gare de Novi Sad en novembre, pourtant récemment rénovée. La catastrophe a fait seize morts. Depuis, les étudiants serbes ne cessent de dénoncer la responsabilité du pouvoir dans la catastrophe ainsi que le détournement d’argent. Le symbole de la main ensanglantée accuse les autorités d’avoir du sang sur les mains. «La corruption tue» est devenue un slogan de ralliement où chacun aspire à la «vérité et à la justice» dans un pays largement corrompu.
En Israël, la guerre à Gaza n’a pas eu raison des mouvements de contestation dans le pays qui dénoncent toujours la réforme de la justice, tandis que celle-ci s’intéresse de plus près à Benyamin Netanyahou et à son épouse pour des soupçons de fraude et de corruption. Alors que le Premier ministre a exigé la destitution de la procureure générale et demandé le renvoi du chef du Shin Bet – service de renseignement intérieur israélien –, le chef de l’opposition Yair Lapid y voit une manoeuvre pour «saboter une enquête criminelle sérieuse» sur les pots-de-vin que le Qatar aurait versé à des proches de Benyamin Netanyahou.
En Turquie, c’est pour une accusation de corruption et de terrorisme que le maire d’Istanbul Ekrem Imamoglu, principal opposant à Recep Tayyip Erdogan, a été arrêté en provoquant les plus grandes manifestations dans le pays depuis dix ans, dénonçant une attaque de l’Etat de droit. Ailleurs dans le monde, des manifestations sur fond d’accusations de corruption ou en réaction à celles-ci se sont multipliées ces derniers mois: de la Macédoine du Nord à la Malaisie en passant par le Kenya ou la Bolivie. Les peuples aspirent à l’honnêteté et à la responsabilité de leurs dirigeants.
Il ne faudrait pas croire que les exemples cités ci‑dessus seraient lointains où éloignés de nos préoccupations. La corruption détruit la confiance nécessaire dans la vie en société, et cela partout! En informatique, lorsqu’un fichier est corrompu, cela signifie qu’il est probablement infecté par un virus. La corruption agit de la même manière. Comme un virus qui se glisse partout, la corruption se développe lorsque les hommes et les femmes de bien la laissent s’engouffrer et agir. Elle n’est pas toujours le fruit d’une intention malveillante, mais aussi parfois le résultat d’un manque de vigilance, de contrôle ou d’une absence de responsabilité. C’est un virus qui s’attaque à toutes les strates de la société. Elle est comparable au poison du péché, qui littéralement «corrompt» tout. Tue tout.
Dans les Evangiles, Jean-Baptiste ne se contentait pas de dénoncer avec courage et audace la corruption morale et sexuelle des puissants, jusqu’à mourir tué par les corrompus. Non, il encourageait aussi chacun à la droiture et à l’honnêteté dans les finances et les responsabilités. S’adressant notamment aux collecteurs d’impôts et aux soldats, il exhortait les premiers à n’exiger rien au-delà de ce qui leur a été ordonné et les seconds à ne commettre ni extorsion ni fraude envers personne, et à se contenter de leur solde (Luc 3, 12‑14). Il laisse un exemple de lutte active contre la corruption, qu’elle soit manifeste ou insidieuse, culturellement acceptable ou scandaleuse.
David Métreau
Article tiré du numéro Christianisme Aujourd’hui Mai 2025
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