Les évangéliques sous la loupe d’un nouveau podcast
Depuis le 21 octobre et jusqu’au 2 décembre, chaque lundi, un épisode du podcast «Mon voisin évangélique» est diffusé sur les plateformes d’écoute. C’est une «curiosité culturelle et intellectuelle» qui a poussé Antoine Gouritin, créateur d’histoires sonores, à collaborer pour la troisième fois avec Regards protestants et le Musée protestant, co-producteurs.
Publicité
En immersion chez ses voisins évangéliques
Le documentariste – lui-même non croyant – nous emmène dans son parcours «en immersion» dans le monde évangélique; il a souhaité sortir des clivages pour livrer un récit accessible, malgré la complexité du sujet et l’immense diversité de cet univers. Pour cela, il s’est d’abord beaucoup documenté, au point de pouvoir entrer dans une Eglise pentecôtiste – «qui pourrait même sembler trop expressive à d’autres évangéliques» – sans être dépaysé. Il témoigne qu’il a été «très surpris d’avoir affaire à des gens qui parlaient de ce qu’ils croyaient avec une distance critique, y compris sur les points problématiques. Personne ne m’a dit: “Je n’ai pas envie d’en parler.”»
Dans une démarche attentive, il met en dialogue les points de vue de spécialistes du christianisme, d’historiens, de pasteurs et de fidèles de différentes dénominations. Ce «regard du néophyte curieux» a plu à Alexandre Antoine, professeur d’histoire de l’Eglise, docteur en histoire des religions et pasteur des Assemblées de Dieu. Il ajoute que lui-même et les autres intervenants ont eu le temps de développer leur propos en ce qui concerne les points les plus mal compris du grand public: «L’idée du “super-évangélisme” a été déconstruite. Je me suis senti à l’aise dans un contexte où on a donné une voix à des acteurs différents.»
Pour Antoine Gouritin, il fallait «vulgariser sans barber». Pour quel public? Le documentariste cite d’abord «les personnes qui ont les mêmes bases que celles que j’avais, moi, avant de faire ce podcast». Ensuite, il s’agissait de «parler des évangéliques aux protestants luthéro-réformés», puisque ce sont des protestants qui ont commandé ce podcast. «L’évangélisme n’est pas un quatrième christianisme. C’est aussi un excellent produit pour les non chrétiens et pour le monde catholique qui a plein de questions. Il a eu les bons spécialistes pour chaque sujet. Un super travail pour le monde évangélique aussi», estime Alexandre Antoine. «Rien n’est mis de côté.»
Connaître son identité
L’accent sur le développement personnel par endroits, l’«Evangile de prospérité», le «combat spirituel territorial» ou les critiques à l’encontre des mouvements charismatiques sont explorés parmi les sujets qui fâchent. Les Eglises issues des diasporas – ou Eglises ethniques – ont aussi une vocation sociale en plus d’être des lieux de «ressourcement culturel», selon un pasteur du Centre missionnaire évangélique. Mettre l’accent sur l’argent donné permet aux fidèles de «savoir qu’ils peuvent entreprendre et réussir dans ce pays, de guérir des traumatismes de l’esclavage et de la colonisation», d’après ce même pasteur. Un autre objectif de la série est d’étudier les influences mutuelles entre l’évangélisme étasunien et français depuis les années 1950.
Autre surprise pour Antoine Gouritin: l’absence de réponses toutes faites chez ses interlocuteurs, qui induit «une désacralisation de la discussion, a permis beaucoup de simplicité dans les rapports avec ces chrétiens». Pour Alexandre Antoine, cela reflète un changement actuel: «Il y a une évolution sociologique du monde évangélique. La montée du niveau du langage intellectuel permet aux pasteurs d’avoir cette simplicité pour parler de ce en quoi ils croient. Un podcast qui doit éveiller», selon l’historien.