Jetés aux crocodiles
La barque approchait lentement de la rive, dévoilant peu à peu les fastes extraordinaires du palais royal. Les deux passagers qui se tenaient à l’avant de la frêle embarcation en papyrus semblaient songeurs.
– Je me demande bien comment on va faire pour entrer là-dedans!
– Pour toi, cela ne devrait pas être très compliqué. C’était ta maison, non?
– Ma maison, ma maison, c’est vite dit! On ne pénètre pas dans le palais royal comme dans la ferme où tu as passé ton enfance!
– Oh, excuse-moi, je sais que je ne suis qu’un paysan sans éducation. Je n’ai pas été choisi par la fille du pharaon, moi! Je suis resté dans le delta à faire des briques pour son père! Mais c’est tout de même moi que tu viens chercher quand tu es dans l’embarras!
– Pardonne-moi, Aaron! Je ne voulais pas te vexer. On ne va pas se disputer maintenant. Il faut trouver un moyen d’entrer.
La barque avait accosté. Les deux hommes se tenaient devant les portes majestueuses gardées par des soldats en armes.
– Tu ne connais plus personne, là-dedans?
– Malheureusement, non! Il y a quarante ans que je suis parti. Tu parles s’il y a dû y avoir du changement depuis. Ah, cela semblait plus facile dans le désert quand Dieu me parlait: «Va voir Pharaon, dis-lui de libérer mon peuple!». Si seulement il était là, maintenant. Tout serait plus simple!
– Mais tu ne crois pas que c’est le cas? Je ne le connais pas aussi bien que toi, mais si tout ce que tu dis de lui est vrai, alors je crois qu’il est toujours un peu avec nous. Surtout dans des moments comme ça!
– C’est vrai que s’il ne fait que se révéler dans des buissons en feu au plein milieu du désert de Madian, il ne nous sert pas à grand-chose. Alors, autant être fixés tout de suite. Soit il nous aide maintenant et alors toute cette histoire de libération de notre peuple ne sera pas qu’un beau rêve…
– Soit il nous laisse tomber, et là on est mal!
– Il faut toujours voir le côté positif et exaltant des choses, Aaron. Autrement, on ne fait rien dans la vie. De toute façon, qu’est-ce qu’on risque?
– D’être jetés aux crocodiles, peut-être…
– Pessimiste, va! On les changera en poissons rouges!
– J’aime ta foi! Avec toi, tout paraît simple. Si je t’écoutais, je croirais presque qu’on peut traverser la mer à pied!
– Qui sait? Mais chaque chose en son temps. Essayons déjà de traverser le palais vivants!
Article tiré du numéro Christianisme Aujourd’hui – septembre 2011
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