Faith checking
Dans une chronique de Sylvain Fort publiée dans L’Express le 6 avril, l’intelligence artificielle (IA) est présentée comme modifiant non seulement notre rapport à la technologie, mais notre rapport à l’humanité; faisant de nous des petits dieux. Selon l’essayiste, l’IA nous donne «la capacité à faire se rejoindre l’abstraction du calcul informatique et l’ensemble du savoir du monde, puis d’utiliser cette jonction pour modifier le réel. Dieu, honnêtement, n’a pas fait autre chose depuis l’aube des temps.»
Il résume avec pertinence ce que l’IA laisse entrevoir: le passage d’une fascinante nouveauté à celui d’une inquiétante menace. En la comparant à une divinité, il est obligé de s’arrêter sur le besoin divin et inné de créer, plus précisément de créer l’être humain, dont la précieuse fragilité défie l’ennuyante perfection d’une machine. Avec justesse, il propose que l’être humain pourrait ainsi, par son détour à la rencontre de – voire la symbiose avec – ce dieu tout-puissant IA, revenir à l’humanité, la vraie, l’imparfaite, la fragile.
Heureusement, peut-on le rassurer, le détour ne sera pas nécessaire. Dans sa force parfaite créatrice plus que calculatrice, depuis l’aube des temps, Dieu a déjà apposé son image sur ses créatures fragiles. Leur appartenance est déjà déterminée ainsi que celle de toutes les créations générées au cours de leur soi-disant ascension vers la divinité par le biais de l’IA. Ainsi, au lieu de retrouver «le sens et le goût de ce qui est faible, provisoire, changeant et mortel» en accédant à la divinité comme proposé par l’essayiste, l’être humain pourrait se voir attiré par le fort, l’intemporel, l’immuable et l’éternel en rencontrant son Créateur.
