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IVG et Constitution: projet mené à terme

© GettyImages
Le congrès du Parlement français a adopté l’inscription de l’avortement dans sa constitution. Une décision qui bouscule dans les milieux évangéliques.

La loi Veil a été adoptée en 1975 dans un contexte de chiffres inquiétants: en une année, 600 000 avortements et 20 000 décès de femmes.
Pourtant, les chiffres juraient avec la réalité, explique François Volff, vice-président de l’Association des chrétiens protestants et évangéliques pour le respect de la vie, qui parle de manipulation après la légalisation des contraceptifs en 1967: «Comme le combat pour la contraception est gagné, celui pour l’avortement commence. Et la presse est largement arrosée pour y habituer l’opinion publique.»

Face aux chiffres médiatiques, ce médecin cite la Revue du Praticien du 11 février 1974: «Lors des entretiens de Bichat 1973, le docteur Monrozies fit un exposé, fortement nourri de statistiques, sur la mortalité et la morbidité comparative des avortements clandestins et des avortements légaux. Il plongea dans la stupéfaction et dans le désarroi les nombreux journalistes présents dans la salle, en indiquant des chiffres sensiblement voisins.» Le médecin affirma aux journalistes que le nombre de décès était de quelques dizaines par an, et non entre 1000 et 6000, et que les chiffres énormes visaient à faire pression sur les pouvoirs publics.

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De la dépénalisation à la constitutionnalisation

C’est dans ce contexte que la loi Veil a été votée. Elle n’était qu’une loi de dépénalisation, les femmes recourant à l’avortement et ceux le pratiquant n’étaient pas poursuivis sous certaines conditions. Elle distingue l’interruption volontaire de grossesse (IVG), autorisée jusqu’à dix semaines, de l’interruption médicale de grossesse, qui peut avoir lieu jusqu’au dernier jour pour raison médicale.

Depuis, le délai pour une IVG a été porté à douze semaines en 2001 puis quatorze en 2022. Dans la loi Aubry de 2001, la «condition de détresse» a été remplacée en 2014 par ces mots: «…qui ne veut pas poursuivre une grossesse». Pourtant, Simone Veil déclarait au moment des débats que «l’avortement doit rester l’exception, l’ultime recours pour des situations sans issue».

Des chrétiens peu unanimes

Luc Olekhnovitch, président de Commission d’éthique évangélique, se montre critique envers cette évolution: «On est passé de ce qui devait être une exception à une inscription du meurtre dans la Constitution. Car avorter c’est tuer un enfant, et cet acte blesse aussi les femmes qui y ont eu recours. On doit avoir compassion de l’enfant et de la femme en détresse, y compris si elle a eu recours à l’IVG. Mais c’est tout autre chose de détruire les repères par la loi, les interdits qui permettent la vie en société.»

Dans un communiqué publié le 6 mars, l’Eglise protestante unie de France (EPUdf) rappelle les positions nuancées des réformés, en mentionnant l’importance des droits des femmes comme «véritable enjeu du protestantisme». Elle rappelle la responsabilité de chacun devant Dieu tout en refusant une position morale arrêtée. L’EPUdF indique sa préférence pour un «incessant débat éthique».

De son côté, le Conseil national des évangéliques de France «s’inquiète des risques que porte cette constitutionnalisation». Il appelle le gouvernement «à veiller à offrir aux femmes qui le souhaiteraient la liberté et les moyens de garder ou de confier leur enfant» et ajoute que les Eglises «veulent rester des lieux d’accueil qui manifestent l’amour, la grâce et la vie que porte l’Evangile de Jésus-Christ» pour celles qui feraient un autre choix.

Christianisme Aujourd'hui

Article tiré du numéro Christianisme Aujourd’hui Avril 2024

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