Hélène a adopté Cécilia, son enfant d’accueil

C’ est un samedi après-midi ensoleillé de fin d’hiver. Le fond de l’air est encore frais. Hélène et Cécilia s’installent à côté du poêle autour de la table de la salle à manger. Ce sera un thé pour la première et un chocolat chaud pour la seconde. Une boisson est nécessaire! Pour se réchauffer certes, mais aussi pour ne pas finir avec la gorge sèche. Toutes deux vont devoir parler. Elles vont faire un exercice auquel elles sont peu habituées. Anticipant ce moment, elles ont commencé à en discuter ensemble plus tôt dans la journée. Elles vont se livrer et raconter leur histoire: le récit d’une adoption peu commune et inattendue!
Première rencontre amusante
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Autre lieu, autre température. Tout commence à l’été 2012 sur les chemins de Compostelle. Membre de l’Eglise baptiste de Compiègne, Hélène Farelly a souhaité mettre un moment à part pour se ressourcer. Marcher laisse du temps pour réfléchir. De retour dans l’Oise, elle est décidée. Elle prend contact avec France Parrainages, une association qui permet à des jeunes vivant en foyer ou en famille d’accueil d’être hébergés régulièrement chez des parrains ou marraines. «L’idée est de les sortir de leur contexte habituel et de leur faire voir d’autres façons de vivre», explique-t-elle.
Trois mois et quelques entretiens psychologiques plus tard, la rencontre a lieu. Cécilia avait alors huit ans. Elle sourit aujourd’hui en se remémorant cet instant. «J’imaginais un couple blond avec un chien et des enfants», se souvient-elle. La situation ne correspond pas tout à fait à ses attentes. Hélène vit seule, est brune et n’a pas d’animaux. Amusant! Passé l’effet de surprise, Cécilia, qui est de nature curieuse, se sent très vite à l’aise. Lors de sa première visite au domicile, elle ouvre tous les placards. «La maison me semblait toute petite», confie celle qui était habituée aux grands espaces de la vie de foyer.
La relation grandit
Hélène et Cécilia définissent avec les éducateurs un contrat de fonctionnement. Pour commencer, l’accueil se fait un week-end sur deux et de temps à autre pendant les congés. Hélène Farelly est professeure en économie et gestion et a l’avantage d’avoir les vacances scolaires. Rapidement, la jeune fille demande à venir davantage. «Au bout de cinq mois, Cécilia a dit qu’elle voulait habiter ici», se rappelle sa marraine de l’époque. «Ce n’était pas incohérent comme elle n’avait plus aucun lien avec ses parents et je n’étais pas forcément contre, mais c’est un sujet très sensible.» En effet, les services sociaux restent prudents voire méfiants. Il y a toujours la peur que ça ne marche pas. Et ils ne veulent pas susciter de déception chez des enfants déjà fragilisés par les épreuves de la vie.
La persévérance finit par payer
Malgré quelques crispations, une procédure est engagée. Les démarches prennent du temps, nécessitent de la persévérance mais finissent par payer! Un an après, la justice intervient pour «un placement chez un tiers digne de confiance». A partir de ce moment-là, Cécilia vit en continu chez Hélène. L’Eglise a alors joué un rôle important dans l’intégration de la nouvelle venue. Une grosse étape est franchie avec cette décision de justice mais la situation n’est pas forcément simple pour autant.
«On a un peu l’impression d’avoir une épée de Damoclès au-dessus de la tête», reconnaît l’enseignante. Une forme d’incertitude quant au futur plane constamment, mais le plus lourd est surtout le besoin fréquent d’en référer aux services sociaux. «Il fallait un papier de leur part pour tout», explique Hélène Farelly. «Que ce soit pour les décisions importantes de sa vie mais aussi pour des choses mineures comme le choix de ses activités extra-scolaires ou l’envoi en colonie de vacances.» En novembre 2015, c’est le début de la sérénité. Hélène reçoit une délégation d’autorité parentale.
Un cas extrêmement rare d’adoption
En 2019, c’est l’adoption, un cas de figure extrêmement rare que ni l’une ni l’autre n’aurait imaginé au début de leur relation. C’est Hélène qui en a parlé la première. Au départ, Cécilia avait peur que la démarche, qui nécessite de retourner au tribunal, l’oblige à se replonger dans son passé. Puis elle s’est faite à l’idée. «Tout ce cheminement m’a montré davantage encore comment Dieu conduisait ma vie», confie Hélène Farelly. Aujourd’hui, elle encourage les chrétiens à ouvrir leur maison. «Sans aller aussi loin que nous, il existe différentes formules qui peuvent convenir à chacun», poursuit-elle. «Ça fait du bien à l’enfant mais aussi à la famille. Ça développe le sens de l’hospitalité.» Pourquoi ne pas en discuter à votre tour autour d’un thé ou d’un chocolat chaud?
