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Une lecture idéologique de la Bible?

Yannick Imbert, professeur de philosophie et d’apologétique à la Faculté Jean Calvin, nous met en garde contre une lecture de la Bible qui serait influencée par nos idéologies.

Dans tout ce que nous pensons et faisons, le danger idéologique nous guette. De même, notre manière d’appréhender la Bible peut être instrumentalisée par certaines idéologies, c’est-à-dire par des systèmes de pensées qui conditionnent notre lecture individuelle et collective de la Bible et nous amènent à interpréter le monde d’une certaine manière. Mais autant il est facile de dénoncer les idéologies qui nous sont extérieures, autant nos propres idéologies sont souvent inconscientes et involontaires. L’idéologie, en effet, a ceci de frappant qu’elle utilise ce qui est le plus proche de nous, ce que nous avons le plus à cœur.

Idéologies écologistes et missionnelles
Je prendrai deux exemples. Tout d’abord, l’idéologie écologiste. Même si la Bible contient une éthique écologique, elle ne parle pas uniquement d’écologie. Or, l’engagement chrétien en faveur de la création conduit parfois à certaines dérives écologistes. Alors que notre position devrait être fondée bibliquement, il nous arrive de lire les textes avec un présupposé fondamental, avec une interprétation qui sera conditionnée par notre idéologie. Cette instrumentalisation idéologique de l’Ecriture nous conduira à considérer ce qui est secondaire comme premier, et vice-versa. Concrètement, on ne peut pas affirmer que les passages d’Esaïe qui parlent du désert se réfèrent d’abord à la création et à l’écologie: ils ont un sens spirituel. A l’inverse, un anti-écolo ne peut pas se baser sur l’épisode du figuier maudit pour prétendre que l’engagement écologique est condamné par la Bible…
Prenons un autre exemple, celui de l’idéologie missionnelle. On observe dans le monde chrétien une volonté de développer une grille de lecture missionnelle de la Bible: ce procédé tend à réduire tout texte biblique à sa simple expression missionnaire. On dira par exemple que Jésus est le missionnaire de Dieu, ou que l’Esprit a pour seule fonction de nous envoyer en mission, ou encore que le Cantique des Cantiques parle seulement de l’amour missionnaire de Dieu. Ce faisant, on nivelle la richesse biblique. La mission fait évidemment partie du langage biblique; mais si l’on prétend que toute la Bible est mission, on se retrouve avec un «surplus de réalité» dont on ne sait pas que faire, c’est-à-dire avec des textes qui ne semblent pas coller avec notre idéologie missionnelle. Nous avons alors deux (mauvaises) solutions: soit forcer ces textes pour les faire entrer malgré eux dans le cadre «mission», soit les rendre invisibles.
Alors comment adopter une lecture non idéologique de la Bible? Je vois au moins deux pistes. La première consiste à bien voir le lien entre idolâtrie et idéologie: l’idéologie est la conséquence sociale de l’idolâtrie, elle émerge lorsqu’un moyen devient une finalité. C’est ainsi qu’on en vient à idéologiser la mission, l’écologie et tant d’autres choses. Deuxième piste: avoir une vie prophétique. Pour être capable de critiquer l’idéologique, il faut voir le Royaume de Dieu comme primordial. Selon Jacques Ellul, cette vie prophétique nous amène à nous baser sur le fondement qu’est la Bible pour évaluer à sa lumière tous les problèmes auxquels nous sommes confrontés. Nous avons besoin d’une nouvelle perspective, de prendre du recul pour nous attacher à Dieu seulement, pour voir la grandeur et la richesse de la révélation biblique plutôt qu’une partie seulement. Ne tolérons pas que ce qui est partiel devienne englobant!

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Christianisme Aujourd'hui

Article tiré du numéro Christianisme Aujourd’hui – mai 2013

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