Le Père Noël est de l’or dur

La chronique mensuelle d'Hugues Not, qui jette un regard doux-amer sur le protestantisme et la société.

Hugues Not 4 Déc 2013

Les magasins sont les premiers à nous le rappeler: c’est bientôt Noël! Mais on parle ici du Noël du Père Noël, non de la naissance du Christ. D’ailleurs, tout le monde sait que Jésus n’est pas né un 25 décembre, au moment de la messe de minuit. Mais on fait semblant d’y croire un peu.
De même pour le Père Noël: il n’a jamais existé, mais on fait comme si. Et pour quelqu’un qui n’existe pas, on se plie en quatre: on accumule les dépenses, on prépare des repas festifs, on réunit la famille, on emballe des cadeaux, on sacrifie des millions de sapins, on illumine les villes. Un peu partout, on fredonne des refrains folkloriques, on sent la dinde qui tourne dans le four et on commence à être écœuré par les chocolats.
On oublie la crise et on fait des folies. Le Père Noël est de l’or dur pour les grandes surfaces qui se frottent les mains, comme les sans-abris et les sans-papiers qui crèvent de froid: parce que c’est l’hiver, quand-même! Le Père Noël n’a pas besoin d’exister pour vivre. Son traîneau laisse des traces depuis notre enfance jusqu’au Pôle Nord et permet d’occulter Pôle-Emploi. Il devient une fuite, l’espace de quelques jours, pour ne plus penser aux extravagances du monde.
Il encense l’enfant rescapé des avortements et des manipulations génétiques. Il s’étonne un peu de cette ineptie qui fait que les garçons commandent des poupées et les filles des camions; mais ce n’est pas trop grave pour son marché. Et surtout, ce n’est pas la première fois que les hommes croient n’importe quoi. Il le sait, lui qui n’existe pas, mais qui n’en est pas mort pour autant.
Cependant, Noël c’est aussi Jésus, la venue du Fils de Dieu. Lui, il existe, mais c’est comme si on n’y croyait pas; il est mort pour la plupart. Me revient cette riposte de mon voisin lorsque je tentais de lui parler de ma foi: «Vous y croyez vraiment? Mais c’est comme si vous croyiez au Père Noël!». N’empêche, il faudrait peut-être que Jésus n’existe pas pour que les gens le fêtent enfin!

Hugues Not