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La dispute, Episode 6: Jean Calvin se lève

La voix courroucée de l’orateur interrompit le portier. - C’est Jean Mimard, catholique et maître de l’école de Vevey, chuchota ce dernier, il vient de passer en revue les illustres théologiens, tel Augustin, qui ont appuyé la thèse de la transmutation. - Vous rejetez les docteurs comme infructueux, imbéciles, ânes, ne comprenant rien au saint Evangile: vous dites: «Nous suivons l’Evangile de Jésus-Christ et sa sainte foi et ne voulons point de ces traditions et constitutions d’hommes.» Quand Jésus dit à ses apôtres: «Prenez et mangez, ceci est mon corps», que veut-il dire par là? Le geste suspendu, Jean Mimard attendait la capitulation de son adversaire. Celui-ci prit la parole et entama une explication déjà maintes fois entendue. Le portier le laissa répondre et s’adressa aux jeunes visiteurs. - La discussion n’avance guère. Caroli va présenter les arguments de la Réforme qu’il finira par renier plus tard, hélas. Mais vous allez bientôt être les témoins de la première intervention du jeune homme qui se tient là-bas, avec les Réformés. – Qui est-ce? demanda Antoine. Un nom que nous connaissons? – Et comment! Ne dites-vous pas de Genève qu’elle est la cité de... – Calvin? s’exclamèrent en chœur Luc et Antoine, ébahis. – Regardez-le. Voyez-vous comme il s’agite? Il sait ce qu’il convient de dire pour répondre à Mimard, mais il est ici en tant qu’auditeur. Il piaffe d’impatience. Il sent bien qu’il lui faut parler car Mimard a semé la crainte et ridiculise les Réformés. Il dresse devant la foule le mur inébranlable de la tradition et affirme que celui qui ose braver ce mur est un rebelle doublé d’orgueil. Le jeune Jean Calvin bataillait intérieurement pour savoir s’il convenait d’intervenir. Il s’approcha de Viret et des autres prédicateurs, comme s’il cherchait à obtenir leur permission. Puis il s’avança à la tribune et prit la parole. Les auditeurs se demandaient qui était ce jeune théologien encore inconnu de la plupart. Antoine et Luc étaient bien les seuls à savoir l’importance du rôle qu’il allait jouer dans la Réforme. – Son cœur bat la chamade, dit le vieux guide. – Mais c’est plus fort que lui, releva Luc. Il sent qu’il est appelé à parler. C’est l’Esprit qui l’y pousse. – Ou l’ambition, objecta Antoine. Il a l’occasion de se placer en acteur incontournable du mouvement. – Non, dit le portier. Il joue en équipe. Il obéit à l’Esprit tout en respectant ses collègues.
Nathania Clark

La voix courroucée de l’orateur interrompit le portier.
– C’est Jean Mimard, catholique et maître de l’école de Vevey, chuchota ce dernier, il vient de passer en revue les illustres théologiens, tel Augustin, qui ont appuyé la thèse de la
transmutation.
– Vous rejetez les docteurs comme infructueux, imbéciles, ânes, ne comprenant rien au saint Evangile: vous dites: «Nous suivons l’Evangile de Jésus-Christ et sa sainte foi et ne voulons point de ces traditions et constitutions d’hommes.» Quand Jésus dit à ses apôtres: «Prenez et mangez, ceci est mon corps», que veut-il dire par là?
Le geste suspendu, Jean Mimard attendait la capitulation de son
adversaire. Celui-ci prit la parole et entama une explication déjà maintes
fois entendue. Le portier le laissa répondre et s’adressa aux jeunes
visiteurs.
– La discussion n’avance guère. Caroli va présenter les arguments de la Réforme qu’il finira par renier plus tard, hélas. Mais vous allez bientôt être les témoins de la première intervention du jeune homme qui se tient là-bas, avec les Réformés.
– Qui est-ce? demanda Antoine. Un nom que nous connaissons?
– Et comment! Ne dites-vous pas de Genève qu’elle est la cité de…
– Calvin? s’exclamèrent en chœur Luc et Antoine, ébahis.
– Regardez-le. Voyez-vous comme il s’agite? Il sait ce qu’il convient de dire pour répondre à Mimard, mais il est ici en tant qu’auditeur. Il piaffe d’impatience. Il sent bien qu’il lui faut parler car Mimard a semé la crainte et ridiculise les Réformés. Il dresse devant la foule le mur inébranlable de la
tradition et affirme que celui qui ose braver ce mur est un rebelle doublé d’orgueil.
Le jeune Jean Calvin bataillait intérieurement pour savoir s’il convenait d’intervenir. Il s’approcha de Viret et des autres prédicateurs, comme s’il cherchait à obtenir leur permission. Puis il s’avança à la tribune et prit la parole. Les auditeurs se demandaient qui était ce jeune théologien encore inconnu de la plupart. Antoine et Luc étaient bien les seuls à savoir l’importance du rôle qu’il allait jouer dans la Réforme.
– Son cœur bat la chamade, dit le vieux guide.
– Mais c’est plus fort que lui, releva Luc. Il sent qu’il est appelé à parler. C’est l’Esprit qui l’y pousse.
– Ou l’ambition, objecta Antoine. Il a l’occasion de se placer en acteur incontournable du mouvement.
– Non, dit le portier. Il joue en équipe. Il obéit à l’Esprit tout en respectant ses collègues.

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