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La dispute, Episode 10: L’héritage laissé par les ancêtres

D’un seul coup, les grands orgues de la cathédrale remplirent tout l’édifice d’un son si puissant qu’il ramena les jeunes gens au présent. On eût dit que la musique avait balayé la foule et son cortège de couleurs vives. Le portier avait disparu. Les Réformateurs avait laissé leur héritage mais leurs voix s’étaient éteintes. Jean Tandy s’était sans doute endormi dans la confiance de son salut. Les orgues avaient refermé la porte du temps ou était-ce le portier qui en avait la clé? Hébétés comme s’ils émergeaient d’un rêve étrange, Antoine et Luc sortirent de la cathédrale et s’arrêtèrent un instant sur l’esplanade d’où ils dominaient la cité lausannoise. Un brouillard d’octobre enveloppait lampadaires et platanes, s’insinuant dans les rues pavées. - Tu as raison, dit Luc en reprenant les derniers mots de son ami. Ce qui compte, c’est notre cœur. S’il est ouvert, la vérité s’y frayera un chemin. - Jusqu’ici, j’ai toujours eu le plus grand respect pour l’héritage que m’ont légué mes ancêtres huguenots. Ils faisaient partie de ceux qui ont trouvé en Suisse un refuge quand la France était balayée par d’incessantes persécutions. J’admirais leur courage, leur liberté d’esprit, mais je craignais d’engager mon cœur envers un Dieu que je ne connais pas vraiment. Ce que j’ai vu aujourd’hui me donne à réfléchir. Il se pourrait bien que Dieu cherche le cœur des hommes après tout, au-delà des mouvements de l’Histoire. Et tu vois, si c’est le cas, je voudrais qu’il me trouve. - L’année dernière, j’ai eu la chance de visiter le Musée du Désert, dans les Cévennes, dit Luc. Et j’ai été frappé par ce que j’y ai vu. Ces hommes capables d’endurer les galères ou la mort à cause de leur foi. Ces femmes enfermées dans la tour de Constance pendant tant d’années et demeurant fidèles. Et moi qui peine parfois à sortir de mon lit ou à éteindre ma console quand il s’agit de payer de ma personne pour un Dieu qui m’aime! Te rends-tu compte des risques énormes qu’ils prenaient pour protéger leurs Bibles? Ils lisaient la Parole avec passion, dans la clandestinité. - Oui, mon père a conservé une Bible si petite que les femmes pouvaient la dissimuler sous leur coiffe. - Et dire que je me contente souvent de jeter un œil distrait à la Bible online de mon portable quand j’ai un moment creux! Tout à l’heure, en écoutant Calvin, je me disais qu’il avait dû passer des années à l’étudier. Et c’est de là qu’il tirait son autorité. Dis-moi, Antoine, ça te dirait d’aller boire une bière au Barbare?
Nathania Clark

D’un seul coup, les grands orgues de la cathédrale remplirent tout l’édifice d’un son si puissant qu’il ramena les jeunes gens au présent. On eût dit que la musique avait balayé la foule et son cortège de couleurs vives. Le portier avait disparu. Les Réformateurs avait laissé leur héritage mais leurs voix s’étaient éteintes. Jean Tandy s’était sans doute endormi dans la confiance de son salut. Les orgues avaient refermé la porte du temps ou était-ce le portier qui en avait la clé?
Hébétés comme s’ils émergeaient d’un rêve étrange, Antoine et Luc sortirent de la cathédrale et s’arrêtèrent un instant sur l’esplanade d’où ils dominaient la cité lausannoise. Un brouillard d’octobre enveloppait lampadaires et platanes, s’insinuant dans les rues pavées.
– Tu as raison, dit Luc en reprenant les derniers mots de son ami. Ce qui compte, c’est notre cœur. S’il est ouvert, la vérité s’y frayera un chemin.
– Jusqu’ici, j’ai toujours eu le plus grand respect pour l’héritage que m’ont légué mes ancêtres huguenots. Ils faisaient partie de ceux qui ont trouvé en Suisse un refuge quand la France était balayée par d’incessantes persécutions. J’admirais leur courage, leur liberté d’esprit, mais je craignais d’engager mon cœur envers un Dieu que je ne connais pas vraiment. Ce que j’ai vu aujourd’hui me donne à réfléchir. Il se pourrait bien que Dieu cherche le cœur des hommes après tout, au-delà des mouvements de l’Histoire. Et tu vois, si c’est le cas, je voudrais qu’il me trouve.
– L’année dernière, j’ai eu la chance de visiter le Musée du Désert, dans les Cévennes, dit Luc. Et j’ai été frappé par ce que j’y ai vu. Ces hommes capables d’endurer les galères ou la mort à cause de leur foi. Ces femmes enfermées dans la tour de Constance pendant tant d’années et demeurant fidèles. Et moi qui peine parfois à sortir de mon lit ou à éteindre ma console quand il s’agit de payer de ma personne pour un Dieu qui m’aime! Te rends-tu compte des risques énormes qu’ils prenaient pour protéger leurs Bibles? Ils lisaient la Parole avec passion, dans la clandestinité.
– Oui, mon père a conservé une Bible si petite que les femmes pouvaient la dissimuler sous leur coiffe.
– Et dire que je me contente souvent de jeter un œil distrait à la Bible online de mon portable quand j’ai un moment creux! Tout à l’heure, en écoutant Calvin, je me disais qu’il avait dû passer des années à l’étudier. Et c’est de là qu’il tirait son autorité. Dis-moi, Antoine, ça te dirait d’aller boire une bière au Barbare?

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