-Tu vas où comme ça?
– Je sors…
– Je vois bien que tu sors, mais tu vas où?
– Ecoute, chérie, je ne vais pas te dire où je vais chaque fois que je sors!
– Ne fais pas le malin avec moi, tu sais très bien ce que je veux dire. Tu ne vas pas là-bas!
– …
– Dis-moi que tu ne vas pas là-bas!
– Je n’ai pas le choix, je dois y aller. Cela ne me plaît pas plus qu’à toi, mais c’est comme ça, je dois obéir!
– Mais tu sais qui est cet homme et ce qu’il fait aux frères!
– Bien sûr que je le sais, mais ça ne change rien. Je dois y aller, c’est tout!
– C’est ça, Monsieur fait son important, Monsieur sait tout mieux que les autres, Monsieur a des révélations particulières que lui seul peut recevoir!
– Chérie, ne rends pas les choses plus compliquées…
– Mais c’est toi qui compliques tout! Ecoute, c’est simple pourtant: cet homme vient dans notre ville pour nous massacrer, nous envoyer en prison, séparer nos familles, détruire notre foi. Nous, on prie comme des malades pour que Dieu intervienne et voilà que le feu du ciel tombe sur lui, l’abat de son cheval et le rend aveugle. On l’amène en ville comme un mendiant, un estropié de rien du tout. Dieu a fait un miracle pour nous sauver. Point final! Mais non, pour toi, c’est trop simple! Toi, le grand Ananias, tu décides, comme ça, d’aller le voir et de le guérir!
– Je ne décide rien du tout, j’en ai reçu l’ordre!
– Parce que tu as plus de discernement que tous les anciens réunis? Tu sais tout mieux que tout le monde? Tu vas même réparer ce que Dieu a fait pour nous sauver!
– Chérie, essaie de voir plus loin, essaie de voir ce que cet homme peut devenir si la grâce de Dieu le touche.
– La grâce de Dieu sur ce Saul? Mais tu es en plein délire, mon pauvre! C’est encore plus grave que je ne le pensais! Cet homme est un fanatique, un religieux de la pire espèce. Il se prend pour le bras vengeur de Dieu. La grâce! Ça ne fait pas partie de son vocabulaire. Je vais te dire, moi, ce qui va se passer. Tu vas le guérir et, aussi sec, il va te tomber dessus, te jeter en prison et nous avec!
– Peut-être…
– Tu dis peut-être et tu y vas quand même!
– Oui, j’y vais quand même…
– Mais tu es fou, mon pauvre époux!
– Non, j’y vais parce que c’est ça, la grâce! Si je ne crois pas que Dieu peut se révéler à Saul, alors ma foi est vaine. Si je ne crois plus que Jésus peut lui pardonner ses péchés et en faire un autre homme, alors, où est mon espérance? Vois-tu, femme, si j’y vais, c’est peut-être davantage pour moi que pour lui!
– …

Christianisme Aujourd'hui

Article tiré du numéro Christianisme Aujourd’hui – avril 2011

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